12 octobre

Hisae, 85 ans, retraitée
Si elle n’avait pas à bouger, si cela n’était pas trop long alors c’était d’accord. L’endroit où j’ai vue Hisae était justement parfait pour moi. Elle habitait juste derrière et elle attendait un véhicule qui allait venir la chercher à 10h30. Il était 10h25 quand je suis allé à sa rencontre. Hisae n’a jamais travaillé. Elle avait été femme au foyer toute sa vie, jusqu’à l’année dernière. Son mari était décédé en 2011 et vraisemblablement, ce n’était pas du tout difficile pour elle. Hisae est née à Odawara, dans la province de Kanagawa.

Cedric Riveau

11 octobre

Keiko, 62 ans, travail à mi-temps
Habillée pour la circonstance, Keiko se rendait à son cours de cérémonie du thé chez son professeur qui habite dans le quartier de Ningyocho où nous nous trouvions. Keiko habite à Chiba mais est née à Fukushima. Comme elle est partie de sa région natale il y a très longtemps avec ses parents, elle n’y a plus de relation. Pas de problème avec le séisme du 11 mars donc. Elle était toute timide devant l’objectif.

Cedric Riveau

10 octobre

Kenji, 45 ans, boucherie
Il venait de faire une livraison dans une institution du côté d’Ichigaya. Quand je suis passé dans la rue, il était en train de prendre son véhicule avec son iPhone. J’ai trouvé cela amusant et puis surtout toute cette association de blancs entre sa tenue et son petit camion. Son entreprise est à Ikebukuro et cette livraison est la plus éloignée des bureaux. J’ai d’abord cru qu’il était poissonnier et je me suis demandé comment on faisait la distinction avec un boucher. Kenji vient de Kumamoto et nous avons donc parlé de sa région que je connais. Il était très sérieux et ne voulait pas sourire devant l’objectif.

Cedric Riveau

9 octobre

Manabu, 31 ans, commercial
Ce grand homme d’affaires pressé ce rendait à un rendez-vous. Je ne le savais pas encore. Son style, son costume et son visage sympathique m’ont poussé à lui demander son portrait. Il ne fallait pas que ça dure longtemps. Il avait rendez-vous avec un client à 13h et il était 12h52. Toujours est-il que c’est lui qui se mit à discuter avec moi, qui me posait plein de questions. J’étais ravi et lui aussi. C’est son téléphone qui l’a rappelé à l’ordre. Il l’a sorti de sa poche et s’est excusé pleinement en s’éloignant. Il devait partir et nous l’avons regretté l’un comme l’autre. Manabu travaille pour une maison d’édition et vient de Tokyo.

Cedric Riveau

8 octobre

Mai, trentenaire, sandwich
Mai était pressée. Je l’ai attrapée alors qu’elle était sur son vélo et s’élançait alors que le feu pour les piétons passait au vert. Elle a vacillé. Mais si elle n’avait pas beaucoup de temps, elle était contente de faire la photo. Sur cette avenue de Mejiro, elle se rendait à la sandwicherie où elle travaille. Mai prépare en cuisine. C’est juste un petit boulot histoire de se faire de l’argent de poche car elle est mariée.

Cedric Riveau

7 octobre

Couple Honpo, 60 ans, restaurant de sushi
Ils se trouvaient tous les deux dans la rue et M. Honpo faisait des photo de la vitrine décorée par sa femme. Elle avait installé cette décoration depuis deux semaines environ avec l’arrivée de l’automne. On pouvait voir des origami de tanuki ou d’oiseaux avec un soleil et différentes objets. C’était très mignon. Elle change environ trois fois par an. Comme ils m’ont invité à entrer dans le restaurant même s’il était fermé en ce dimanche de week-end de trois jour, j’ai découvert qu’elle faisait aussi toute la déco intérieure. Ils ont donc exactement le même âge et tiennent le restaurant depuis 32 ans. Mme Honpo est la troisième génération à s’en occuper. Leur fils a aussi commencé et continuera le magasin par la suite. Ils étaient très sympa et accueillants. Leur magasin est à Daimon.

Cedric Riveau

6 octobre

Shigeko, 67 ans, bénévole
Shigeko se rendait à son ancienne université pour aider à la préparation de la fête annuelle qui avait lieu le jour même. Elle n’avait pas beaucoup de temps mais a tout de même accepté. Elle est née dans le quartier de Chiyoda – où nous nous trouvions – mais elle habite dans le quartier de Minato depuis longtemps déjà. Cette femme énergique et déterminée m’a donné son âge sans que je lui demande. Une chose particulièrement rare. J’ai marché un petit peu avec elle pour l’accompagner et elle est entrée dans l’école rapidement.

Cedric Riveau

5 octobre

Daiya Piano Santa, 19 ans, étudiant
Il a voulu que je mette son nom d’artiste. Daiya a monté un groupe de musique country avec quatre autres personnes. C’est un fan et lorsque je l’ai interpellé, il écoutait du yodel suisse. Sur le coup, je n’ai pas compris tellement je ne m’y attendais pas. Je croyais que c’était le nom d’un groupe… Quand j’ai compris, j’ai éclaté de rire tellement cela me paraissait improbable. Daiya est étudiant en musique et son rêve est de devenir professionnel. J’ai beaucoup aimé son style et sa coiffure.

Cedric Riveau

4 octobre

Yasuka, 28 ans, achats
Une petite peste charmeuse au tempérament d’acier. Yasuka a commencé par me dire qu’elle n’aimait pas les photos. Après avoir négocié, je l’ai vue poser en véritable professionnelle devant mon objectif en prenant des poses de studio, changeant à chaque ouverture du rideau. « T’as pigé hein ? » m’a-t-elle lancé à la fin quand je lui ai dit qu’elle avait été mannequin avant. Elle avait un côté très cosplay qui fut renforcé par ses poses. Elle allait déjeuner à quelques centaines de mètres du bureau quand je l’ai croisée. Yasuka vient d’Hokkaido où elle m’a sommé d’y aller car les filles sont mignonnes, les huîtres délicieuses et les paysages magnifiques. Voilà qui était clair. Elle travaille pour une des plus grosses entreprises d’informatique mondiale et je me suis bien demandé comment ça se passait au bureau avec ses collègues. Elle écoutait du Bach.

Cedric Riveau

3 octobre

Kaori et Haruka, 36 ans et 3 mois, vendeuse
Normalement, Kaori travaille dans ce magasin qui vend un peu de tout, même des vêtements mais ce jour-là, elle s’occupait de sa nièce, Haruka. Sa grande soeur se reposait un peu car elle travaille alors que l’accouchement a eu lieu il y a peu de temps. Sa grande soeur travaille aussi dans ce magasin. Un magasin de famille construit par son grand-père dans le quartier de Toranomon. Je n’ai pas pu discuter avec Kaori comme je le voulais car il y a avait une espèce de garde chiourme de vendeuse – dont je n’ai pas compris la position – qui d’un seul coup nous a interrompu sèchement pour me signifier qu’il était temps que je parte, qu’elles étaient occupées. Une attitude particulièrement grossière d’une frustrée de la soixantaine qui cherche à développer une méga complexe de supériorité. Cela m’a perturbé.

Cedric Riveau

2 octobre

Misato, 25 ans, vente
Misato sortait de son bureau dans cette petite rue de Hongo. Elle allait voir un client un peu plus loin. Elle travaille pour une banque japonaise. Avec un grand sourire, elle a accepté tout de suite de faire la photo. Nous nous sommes très bien entendus et nous discutions librement comme de vieux amis. Misato est née à Fukushima mais a grandi à Tokyo où ses parents habitent depuis longtemps, à Machida. Seuls ses grands-parents sont encore là-bas et ont dû apprendre à vivre avec les radiations de la centrale nucléaire. Mais le séisme du 11 mars n’a rien détruit chez eux.

Cedric Riveau

1 octobre

Yasuo, 40 ans, propriétaire de café
Il allait à Ikebukuro pour prendre le train et se rendre à Saitama où se trouve son café. Il habitait pas loin de là où nous étions. Nous nous sommes croisés dans cette magnifique vieille rue conservée du quartier de Yoshizaka, rue qui mène au sanctuaire de Kishimojin. Il était content que je lui demande son portrait.

Cedric Riveau

30 septembre

Takashi, 27 ans, tatoueur
Un tatouage sous l’œil, je n’en avais jamais vu. La première chose que je lui ai demandé est si cela avait plus mal qu’ailleurs. La bouche à moitié pleine de ses brochettes de poulet qu’il avalait en guise de déjeuner, il me répondit qu’il n’avait rien senti parce qu’il avait fait une anesthésie. Cela me paraissait logique. Sinon, il a des tatouages absolument partout. Depuis qu’il est enfant. Une véritable passion. Il souleva son bras droit pendant notre discussion et j’aperçu une touche de couleur quand tout le reste était bleu. Je reconnu le symbole de gâteaux très connus de Fukuoka, à Kyushu. C’est précisément parce qu’il venait de Hakata à Fukuoka qu’il l’avait fait. Il était content et fier que j’ai reconnu. Takashi se trouve à Tokyo depuis 4 ans environ et rentre 3 ou 4 fois par an. Il travaille dans un magasin à Nakano, juste à côté de là où nous étions. Sympa et tranquille, le jeune homme a tout de suite joué le jeu mais voulait absolument faire une grimace devant l’objectif. J’ai choisi la photo où la grimace est la moins appuyée.

Cedric Riveau

29 septembre

Isao, 26 ans, jardinier
J’ai adoré sa position. Il s’est relevé quand je me suis approché et quand il a compris ce que je voulais mais je lui ai demandé de se remettre tel que je l’avais vu. Il a ri. Il fallait dire que cet énorme sac de feuilles et de branches étaient particulièrement lourd et il devait traverser ce grand carrefour avec. Il l’appuyait donc sur la rambarde en attendant que le feu passe au vert pour les piétons. Le camion qui emporterait toute cette verdure coupée se trouvait diamétralement opposé au coin de plantes où plusieurs jardiniers de la voirie travaillaient. J’ai cru qu’il était plus vieux que cela en le voyant. Il m’a expliqué qu’on lui faisait souvent cette remarque. Le jeune homme est originaire de Gifu. Il est ensuite revenu avec sa bâche vidée pour la remplir à nouveau avec ses collègues. Il m’a guetté avec mon vélo et m’a fait un grand signe de la main au moment où je suis parti. Un geste qui m’a beaucoup touché. Dommage que le soleil tombait directement sur son visage. Du coup, l’ombre de sa visière cache son regard.

Cedric Riveau

28 septembre

Koji, 24 ans, yakuza
Ou c’est ce qu’il a voulu m’affirmer. Dans cette série de portrait du jour, c’était la première fois que je faisais des photos de nuit. Il était 22h30 du côté d’Akasaka. Abordé des gens dans la rue au quotidien étonne toujours mais la nuit, c’est encore plus difficile. Et puis en raison du manque de lumière, il m’a fallu trouver cet auvent équipé de quatre néons bien froids, bien directs mais qui m’ont permis de prendre quelques portraits. Koji rentrait chez à lui Roppongi et marchait. Il avait fini sa journée. A faire quoi ? Il me chuchota ce qu’il faisait et m’a donné un faux prénom pour ne pas être trop identifiable. En le voyant, j’ai cru qu’il était « host » mais peut-être est-ce lié. Il était aussi grand que moi.

Cedric Riveau

27 septembre

Suzuki san, 75 ans, PDG
Il a fallu quelques mètres avant qu’il s’arrête. Du coup, je lui parlais tout en roulant à côté de lui en vélo. Puis il a lâché la manette et son véhicule s’est arrêté. Ce n’est pas un accélérateur mais une poignée de contrôle à l’intérieur du volant. J’avais un peu de mal à comprendre ce papy qui n’articulait pas du tout. Il parlait assez peu et avait un visage tout à fait inexpressif. Je n’ai pas réussi à lui faire incliner la bouche vers le haut ou le bas. Elle est restée parfaitement droite pendant la prise de vue. Même après quand il parlait. Suzuki san a une entreprise de consulting et travaille encore. Il se rendait à un rendez-vous m’a-t-il dit mais je l’ai revu quelques minutes plus tard dans ces petites rues d’Ikebukuro.

Cedric Riveau

26 septembre

Kagero, 39 ans, guitariste
Kagero, c’est son nom de scène. Il m’a demandé de l’utiliser. Kagero fait des concerts de punk-rock depuis plus de 20 ans et fait partie du groupe The the kuro depuis deux ans, ambiance très noir avec un peu de gothique, tout comme son style. Il ne sort pas dans la rue autrement que dans cette tenue et avec tous ses accessoires : bagues, bracelets, clous… Dès que j’ai mis mon appareil devant moi, il a pris une pause bien déterminée avec un visage froid. Sauf que j’ai réussi à lui tirer un petit sourire très léger. Kagero est originaire de Sapporo à Hokkaido où il m’a invité à aller. Il m’a aussi proposé de passer au concert du 13 octobre à Ikebukuro. Il allait à la station de métro pour se rendre à un rendez-vous à Meguro.

Cedric Riveau

25 septembre

Sayuri, 26 ans, café
Sayuri sortait du boulot et allait à la gare de Yotsuya pour prendre le train et rentrer chez elle. Elle travaille dans une chaîne de cafés bien connue à Tokyo où j’étais allé le jour même. Elle était très contente d’être prise en photo et m’a serré la main à la fin. La miss a un petit ami qui a le même âge. Ils ne vivent pas encore ensemble mais Sayuri aimerait bien se marier, avoir des enfants. J’ai adoré son pantalon vert pomme pâle, ce qui l’a fait beaucoup rire.

Cedric Riveau

24 septembre

Hiroshi, 50 ans, cuisinier
Encore un vélocipède, comme la veille ! Mais avec son vélo blanc, son short, son petit chapeau, sa chevalière montée d’une pierre rouge, son mégo au bout des doigts et ses lunettes de soleil à paillettes… je n’ai pas résisté. J’ai abordé Hiroshi à un carrefour qu’il attendait de traverser. Il a accepté mais pour lui aussi, il fallait se dépêcher. Il allait travailler à côté de l’université de Waseda et n’avait pas beaucoup de temps. J’aurais tellement aimé discuter davantage aussi ce jour-là. Et lorsqu’il m’a donné son âge, je suis tombé à la renverse. Vraiment. J’ai fait deux pas en arrière pour le regarder davantage : « Naaaaaan, tu m’fais marcher ! » Je pensais qu’il avait mon âge et sa tenue y faisait beaucoup. Nous avons donc fait la photo rapidement, de sorte qu’il puisse repartir aussitôt.

Cedric Riveau

23 septembre

Sasaki san, 70aine ?, femme de ménage
Voilà un élément typique de paysage tokyoïte que je voulais prendre en photo depuis un moment. Sans parapluie donc, Sasaki san se déplace en vélo tout le temps, de chez elle à son travail. En ce dimanche midi, elle rentrait chez elle après avoir travaillé toute la matinée. Je l’ai abordée sans y croire et j’affichai un immense sourire quand elle m’a dit oui. Comme nous étions à un carrefour et qu’elle s’apprêtait à traverser, je lui ai proposé de l’accompagner de l’autre côté de l’avenue pour faire la photo, histoire de la retenir moins longtemps. J’aurais vraiment aimé la mettre dans le livre mais je ne sais rien sur elle, Sasaki san était fatiguée, il pleuvait des cordes et elle ne voulait qu’une chose : se mettre au sec chez elle. Elle est née à Tokyo.

Cedric Riveau